martes, 9 de octubre de 2007

Marinero En Tierra Firme

MARIN EN TERRE FERME


“…A mi me dieron el mar y sus orillas, y el golpe de la espuma, el viento y el agua, y el aire de los labios que son las palabras...”
Piero

[ « À moi, ils m’ont donné la mer et ses rivages,
et un coup d’écume, le vent et l’eau, et l’air des
lèvres que sont les mots”
Piero]


CHAPITRE I

JE RESPIRE L’AUTOMNE AVEC LE PRINTEMPS DANS LA PEAU

Par Víctor Corcuera Cueva

Les yeux sensuels de Nacie reflétaient son âme qui se déchirait, ses lèvres murmuraient dans le silence de la chaotique et diurne liménienne, tandis que Philippe avec ses yeux tranquilles, plein de bonté et sagesse, exprimait avec un léger et expressif geste. Nous le savons, l’heure est arrivée. L’entêtée et rebelle Florence regardait d’un côté et de l’autre pendant que ses mains angoissées et ses yeux rougis émettaient un écliptique sentiment juvénile. Alban avec ses yeux d’autruche, voyant clair, regardant et écoutant les phrases du moment « D ».

Trujillo, ville de fondation espagnole, les siècles ont passé en éraflant à peine la cité. Des migrations constantes de peuples de l’aride et ardente côte du Nord, ainsi que de l’accidentée sierra andine et pourquoi pas, de la chaude, humide et tropicale jungle, sont arrivées pour « assaisonner » cette ville, la faisant ce qu’elle est aujourd’hui : Trujillo du Pérou.

Je suis né dans cette ville, cité de « pantorrilludos » [cité de « gens aux mollets bien développés »] où s’est initié l’exploit libérateur et émancipateur du Pérou. Mon indomptable tempérament de voyageur et ma curiosité m’ont toujours conduit vers des endroits paradisiaques et, très peu de fois, vers de fortuits et apocalyptiques « tombées du jour ». Depuis mes fières bottines militaires jusqu’à mes chaussures de marche, en passant par mes llanques [NdT : sandales faites de pneus récupérés], mes sandales de cuir et, très peu souvent, la plante de mes pieds, j’ai marché sur des pentes, des dunes ondulantes et séductrices où, souvent, ses ombres féminines m’ont invité à me fusionner intégralement avec ses sols chauds. C’est que j’ai toujours été un éternel amant de la nature à son état vierge et sauvage ; cet état de constante dialectique m’a amené à être ce que j’aime et ce qui m’habite : un voyageur sans frontière et un citoyen du monde.

Assurément, Jonathan le Goéland aurait aimé se faire homme lui aussi... pour aller plus loin que ce que ses ailes et son imagination ne lui permettaient d’aller.

Par chance, mes activités m’ont permis de connaître des gens de différentes latitudes et horizons. Je découvre chaque jour les hétérogènes réalités sociales du vaste territoire andin péruvien. Là où la chaleur des gens, leurs coutumes, leur hospitalité et leur effort m’ont motivé à continuer de croire en ce pays qui s’efforce d’avoir un futur digne. Et je ne suis pas le seul à le dire, mais aussi mes éventuels passagers que j’ai l’opportunité d’escorter et de guider. Récemment, j’ai travaillé en tant que TC [accompagnateur, Tour leader, Tour conducteur] au Sud. Une nouvelle route et de nouveaux horizons s’ouvrent sur les désirs d’explorer le pays des Incas et leurs ancêtres. L’avion qui me sépare de Lima Bizarra (« Lima, la bizarre ») à Juliaca me permet de séparer, de manière verticale, la superficie andine, où les brèches, les ruisseaux et l’incontestable couleur marron terracota se distinguent et traversent les petites fenêtres de l’avion, par lesquelles mon cœur ému perçoit et palpite arithmétiquement à chaque seconde de kilomètre observé. La dense couche de nuages me grise et dissout mes pensées et mon imagination d’entrer dans un monde de wiracochaz [NdT : Dieu créateur] et de Persée.

Le pilote annonce l’heure de l’atterrissage, après quelques heures et après avoir passé au-dessus du nombril du monde [NDT : Cusco signifie « nombril du monde » en langue quechua], nous atterrissons enfin à l’aéroport de Juliaca. Deux agents de sécurité me donnent gentiment les indications pour prendre un autobus que m’apportera au port du Lac sacré, où selon la légende Manco Cápac y Mama Occllo émergèrent pour fonder le Tahuantinsuyu [NDT : en quechua « l'empire des quatre quartiers », en référence à l’Empire Inca].

À ma grande surprise, le froid ne pénètre pas mes os, une sensation que me permet d’observer le trajet de Juliaca a Puno. J’arrive à mon hôtel, mon groupe de passager m’attend à la réception. J’émets un grand et sincère sourire et les salue, leur serrant la main à chacun. Après leur avoir donné les instructions et l’horaire de la visite pour le lendemain, nous nous donnons rendez-vous pour le souper. Je sors explorer les rues inclinées de Puno, l’avenue Lima, le passage piétonnier où abondent les restaurants et pizzerias. Après avoir conversé avec la majorité des propriétaires, je trouve un restaurant approprié pour mes passagers. Ambiance chaleureuse, service accueillant et hospitalité où, en soirée, jouera une famille de musiciens qui interprètent des mélodies andines. La nuit tombe soudainement, où l’absence de l’astre roi laisse la place au scintillant firmament. Un vent froid annonce une nuit d’étoiles filantes …

À suivre….

Víctor Corcuera Cueva
Trujillo, 29 novembre 2006


Traduit par Maryse Tétreault

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